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L’orientation active est présentée comme une démarche de conseil et d’accompagnement mise en œuvre par les universités qui permet de guider les étudiants vers la filière où ils ont le plus de chance de réussir en leur donnant un avis préalable sur leurs possibilités de réussite ou d’échec, au vu de leurs résultats antérieurs. Pour l’instant, ils ne sont pas contraints de suivre l’avis rendu, et en principe, toutes les voies post-bac restent accessibles à tous les étudiants.

Mais certains avis sont formulés d’une manière très dissuasive, notamment par la faculté de médecine, qui au vu des résultats de terminale d’un élève, lui renvoie des appréciations telles que « n’a aucune chance de réussir dans cette voie », « résultats insuffisants qui laissent prévoir un échec » : etc…

Cette démarche spéculative et prospective est d’ores et déjà contestable, dans la mesure où l’on connaît des élèves qui se sont mis au travail après le bac, après avoir mûri, avec une motivation plus grande pour des études dont ils avaient choisi le contenu…
Et elle ne tient pas compte non plus du fait que la tentative, même ratée, est parfois formatrice : elle oblige alors l’élève à faire le point en connaissance de cause, cette fois-ci au sein d’une réflexion personnelle, beaucoup plus constructive qu’une pression venant de l’extérieur.

Cela ne serait rien (!), si ne s’y ajoutait cette année, la généralisation d’une procédure d’inscription par internet, baptisée « portail unique », qui oblige les futurs étudiants à suivre un parcours très complexe pour formuler des vœux de formations post-bac (voir le site Admission-postbac)

Notons déjà que la notion de « portail unique » est un leurre, car des établissements le refusent et préfèrent continuer à recruter selon leurs propres critères : c’est le cas de l’Université parisienne de Dauphine, qui « procède à un recrutement sélectif et aura donc sa propre procédure d’admission ». Souvent, ce portail unique ne concerne d’ailleurs aussi que les formations proposées au sein de l’Académie d’origine ; pour les autres, les élèves « extérieurs » ne sont pas prioritaires !

CETTE PROCEDURE EST INQUIETANTE A PLUSIEURS TITRES

Elle est très compliquée

 Possibilité pour chaque candidat de formuler 36 vœux chacun, mais seulement 12 par types de formation…
 Période de formulation et classement des vœux du 20 Février au 20 Mars, puis trois phases de réponses de trois jours seulement (début Juin, fin Juin, mi-Juillet) où le candidat doit réagir aux propositions en 72h, par quatre types de réponses :

  • oui définitif
  • Oui mais
  • Non mais
  • Démission générale (sic)

La dernière phase de réponse servira à affecter ceux qui n’auront été pris nulle part, ou qui ne se seront pas décidés au bon moment, dans les formations où il restera des places, indépendamment des vœux initialement formulés !!!

Cette procédure informatique ne dispense pas du traditionnel dossier-papier ni de l’inscription administrative dans l’établissement d’accueil : où sont la simplification et le gain d’efficacité ?

Elle est inique

La « fracture numérique » est une réalité que l’on nous demande de prendre en compte dans nos pratiques pédagogiques d’utilisation des TICE, mais pour ces formalités administratives, il n’y a aucun problème !
Il faut que le candidat ait accès à un ordinateur connecté à internet, au moins durant les quatre périodes-clés de la procédure (entre temps, il doit aussi surveiller sur internet la réception de ses dossiers-papier, pour répondre à d’éventuelles demandes de pièces manquantes) ; il faut qu’il ait une adresse électronique valide ; il faut qu’il puisse imprimer une fiche de vœu par formation demandée ; et il faut qu’il ait un minimum d’habitude de navigation sur un site internet, avec certaines subtilités : ainsi, les vœux ne seront modifiables que s’ils sont sélectionnés et non validés ; un vœu accepté par « oui, mais », doit être ré-accepté à la phase de réponse suivante, pour rester valable !...

Rien que la lecture du Guide du candidat, en format .pdf (ADSL recommandé !), demande un niveau de compréhension qui n’est pas à la portée de tous…

Elle est anxiogène

Régulièrement, des notes en gras dramatisent cette procédure d’inscription :

 « Dès que vous aurez validé un vœu, vous ne pourrez plus le supprimer » : et voilà un choix d’avenir qui peut tenir à un clic intempestif !!
 « Si vous ne répondez pas, à chaque phase, avant vendredi 14h, vous serez définitivement éliminé » : et que se passera-t-il si l’accès au site sature suite aux connections quasi-simultanées des 450 000 candidats potentiels ?
 « Charte des droits et devoirs du candidat » : la candidature est désormais présentée comme un véritable engagement moral !
 « vous obtenez satisfaction sur l’un de vos premiers vœux, vos autres demandes moins bien classées par vous s’annulent » : d’où l’importance stratégique du classement des vœux, et l’interdiction, donc, de changer de choix au troisième trimestre, suite à l’évolution des résultats, à l’avis des enseignants ou à des imprévus de vie personnelle !

Elle est discriminante

Marie DURU-BELLAT, sociologue, professeur à Sciences-Po constate : « Quand on pense aux inégalités sociales face à l’école, on a souvent en tête les inégalités de réussite, la thématique connue du handicap socio-culturel, l’échec scolaire, la question des moyens… Pourtant, les recherches européennes montrent depuis 30 ans que dans les inégalités sociales de carrières scolaires, les inégalités de choix et d’orientation pèsent autant que les inégalités de réussite. Alors que, méritocratie oblige, les élèves devraient connaître les destinées scolaires correspondant à leur niveau académique, on observe que, à réussite identique (donc à mérite scolaire identique), celles-ci divergent très largement. D’où l’enjeu des questions d’orientation pour qui s’intéresse aux inégalités face à l’école »

(suite de l’article sur le site « Observatoire des inégalités » )

Les conseils donnés sur le site Admission post-bac montrent d’ailleurs que cet enjeu est pris en compte : ainsi lit-on « Vous et vous seul devez établir vos demandes sans céder à une quelconque pression extérieure et sans vous autocensurer » : mais l’injonction bienveillante peut-elle contrer le poids du déterminisme social et intellectuel ?
La procédure du portail unique ne bénéficiera qu’aux « initiés » !! Les autres risquent tout bonnement de renoncer à des études post-bac devant cette première épreuve administrative, qui masque une volonté très pragmatique de gérer les flux d’étudiants, d’une manière encore une fois, rentable, et de les réduire si possible… Avec la possibilité ultérieure de permettre aux établissements post-bac de choisir les meilleurs étudiants potentiels : aucune transparence ne pourra être faite sur la gestion des listes d’attente : à aucun moment, le candidat ne sait où il est placé dans la liste d’attente lorsqu’il ne répond pas « oui définitif » tout de suite.

Que pouvons-nous faire en tant que syndiqués, dans nos établissements ?

D’abord, faire connaître cette évolution pernicieuse du système, qui paraît effarante : être informés en tant qu’enseignants, pour pouvoir mieux riposter, mais aussi veiller à l’information des élèves de terminale de cette année, qui vont « essuyer les plâtres » ! Dans certains lycées, des réunions ouvertes aux parents et aux collègues, ont eu lieu, animées par la Direction et les Co-psy ; ailleurs, l’information passe par les professeurs principaux, avec plus ou moins de fiabilité (et pour cause !! puisque seuls les professeurs dits « référents » ont eu accès cette année, à deux demi-journées de formation, entre autres à ce sujet !)

Ensuite, dénoncer, par une motion en C.A.* par exemple, de tels dispositifs qui remplacent le dialogue par une communication mécanique, qui gèrent des êtres humains comme des produits à répartir au mieux, qui nient aux jeunes la faculté de changer, d’évoluer en ne leur laissant plus le temps de se chercher et de réfléchir à leurs choix d’études…

* exemple de motion du Lycée Jean-Marc BOIVIN, à Chevigny

Enfin, rappeler la nécessité du travail d’orientation avec les Co-psy qui sont les seuls personnels compétents à même de guider sans influencer, les jeunes dans leurs choix ; or, ce travail est de plus en plus délégué aux professeurs principaux, notamment en terminale : ceux d’entre eux qui prennent conscience de leurs nouvelles responsabilités ont de quoi se sentir mal à l’aise !

A ce sujet, nous vous rappelons que nous avons transmis aux secrétaires de S1 une enquête sur l’orientation active : faites-nous remonter ce qui se passe dans vos établissements, merci ! snes21@dijon.snes.edu

Pour leur part, les membres du Secrétariat Départemental de Cote d’Or interviendront dans le cadre de la préparation du congrès, pour que le SNES combatte vigoureusement ces procédures et en exige du ministère l’ abandon.