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Le point sur...

Le fonctionnement budgétaire d’un établissement

Interview d’un Attaché Principal d’Intendance

mai 2003

Beaucoup de collègues se posent de multiples questions au sujet du budget de leur établissement et, notamment, de la part dont disposent les CDI.

Un Attaché Principal de l’Administration Scolaire et Universitaire (APASU), gestionnaire agent comptable d’un lycée de l’académie de Créteil, a répondu aux questions du SNES. Entretien transcrit en mai 2003.


 Sur quels budgets les CDI peuvent-ils acheter du matériel ? Quels types de matériels ?

Les CDI ont en général besoin de produits ou matériels qui ont une courte durée de vie, qualifiés de non immobilisables ("qui se consomme par son premier usage") : livres, revues, CD... par opposition au gros matériel ou mobilier. Ils sont payés essentiellement sur le chapitre A1 (activités pédagogiques et éducatives de l’enseignement général, dits aussi crédits d’enseignement et J1, le même budget pédagogique, mais pour l’enseignement technique. Sur ces chapitres A1 et J1, deux comptes intéressent directement les CDI, le 618-1 "Documentation" qui permet la gestion des abonnements, et le 618-6 "bibliothèque des élèves" pour le fonds documentaire.

 Dans quels établissements trouve-t-on le chapitre J1 ?

Dans tous les lycées professionnels, techniques, généraux et technologiques ; dans les lycées ayant une SEP - section d’enseignement professionnel ; dans les collèges dotés d’une SEGPA - section d’enseignement général et professionnel adapté.

 Qui fixe les parts du budget affectées aux différents chapitres ?

La collectivité de rattachement donne une orientation de principe. Ensuite, au titre de l’autonomie des établissements, c’est le chef d’établissement qui fixe les montants de chaque chapitre et soumet le budget à l’approbation du Conseil d’administration.

 Quel est le rôle du Conseil d’administration ? Pour le chapitre A1, crédits pédagogiques, par exemple ?

Le CA arrête les crédits ouverts à un chapitre mais pas leur répartition à l’intérieur de celui-ci. Au sein d’un chapitre, on a donc toute liberté. Le chef d’établissement ou le gestionnaire peuvent décider seuls. Pour le A1, la décision peut être prise dans une réunion de conseil d’enseignement avec les coordonnateurs de chaque discipline et la participation du/de la documentaliste. C’est certainement la meilleure modalité. Les crédits des disciplines sont inscrits au chapitre A1.

 Les CDI peuvent-ils avoir part à ces crédits en plus de ceux qui sont affectés ?

On peut tout à fait concevoir que les disciplines participent à la constitution du fonds documentaire en prélevant sur leurs propres crédits. Il s’agit d’arrangements internes entre collègues.

 Si, en fin d’exercice budgétaire (fin de l’année civile), il reste de l’argent sur les crédits pédagogiques, le/la documentaliste peut-il en bénéficier ? Faut-il une décision du CA ?

Puisque le CA n’intervient pas sur la répartition des crédits au sein d’un chapitre, la décision relève d’un accord entre les partenaires concernés : enseignants, gestionnaire, documentaliste.

 Les fournitures spécifiques nécessaires au CDI (papier plastique, matériel de cotation, papèterie, etc.) sont-elles payées sur le compte 618-6 "Bibliothèque des élèves" ?

Les pratiques varient. Dans mon lycée, c’est pris sur le budget général ; dans d’autres sur le budget du CDI. Dans ce cas, il faut veiller à grossir d’autant ce compte 618-6 qui peut être subdivisé en livres, fournitures, etc.

 Et la reprographie ?

Dans les gros établissements, c’est imputé au chapitre A1 (crédits pédagogiques de l’enseignement général). Dans un petit établissement où il n’y a qu’un photocopieur pour les enseignants et l’administration, cela passe souvent sur le budget général. Par ailleurs, tout ce qui concerne l’achat et la maintenance du matériel est imputé au chapitre C "Entretien".

 Y a-t-il des crédits pour les logiciels ?

Oui, dans tous les établissements, des crédits spécifiques inscrits au chapitre A2 : activités éducatives et pédagogiques, régime spécial. Ce sont des crédits dits affectés, qu’on ne peut utiliser que pour l’usage désigné.

 Quels sont les autres crédits spécifiques ?

Il y en a plusieurs, sur différents chapitres. Vous avez les subventions pour les manuels scolaires au A2 aussi. On peut encore avoir sur ce chapitre des versements ponctuels de l’Etat, pour l’équipement et l’achat de fonds documentaire pour le CDI par exemple.

Le J3, éclaté en J31, J32... est réservé aux crédits FAI (Fonds d’Aide à l’Innovation), PAE (Projets d’Action Educative), Projet d’établissement... Par exemple, en J31, se trouvent les crédits attribués aux classes à PAC (Projet Artistique et Culturel).

 Qui est avisé de ces attributions de crédits ?

Ce sont des dotations pour l’établissement : le chef d’établissement et le gestionnaire en sont donc informés.

 Le Conseil d’administration et les intéressés ?

Les intéressés doivent avoir une copie de la notification d’attibution de ces crédits spécifiques. Au CA, on présente une DBM (Décision Budgétaire Modificative) pour information seulement, puisque les crédits sont affectés à une dépense précise par l’autorité de tutelle : il n’ y a pas de vote.

 Les CDI peuvent-ils prétendre à une part de ces crédits spécifiques ?

Classes à PAC, à projet scientifique et technique, projets d’établissement, logiciels... font l’objet de ressources spécifiques ou affectées. Les CDI qui participent aux projets financés sur ces crédits peuvent tout à fait en obtenir une part. Par exemple, dans le cadre d’une classe à PAC, cela permet de constituer un fonds documentaire lié à l’objet du projet. Le CA n’intervient pas en la matière. C’est toujours le chef d’établissement qui détient l’opportunité de la dépense. Cela dépend ensuite du degré d’autonomie qu’il laisse aux uns et aux autres. C’est avec les collègues concernés qu’il faut donc négocier.

 Dans les ZEP (Zone d’Education Prioritaire), des crédits supplémentaires sont attribués. Les CDI peuvent-ils en bénéficier ?

Tout à fait. Ce sont des crédits affectés dont la répartition se fait au sein de l’établissement. De même, les CDI peuvent avoir un quota sur d’autres crédits affectés : sections Sports-Etudes, actions d’insertion professionnelle (MIGEN), les Réseaux d’Etablissements de Proximité (REP)... Il faut se renseigner dans chaque établissement concerné par ces différents dispositifs.

 Si le CDI a besoin d’une somme complémentaire au budget initial, peut-on la prélever sur les fonds de roulement (ou fonds de réserve) ?

Les fonds de réserve sont constitués par des fonds non dépensés au cours d’un exercice budgétaire, par des recettes excédentaires ou imprévues. On peut en effet y puiser pour des achats. Il faut présenter un rapport d’opportunité au CA pour justifier sa demande. Ce prélèvement fait l’objet d’une décision modificative au budget (DBM) votée par le CA, si les fonds de réserve sont suffisants, bien sûr.

 Comment acquérir le gros matériel nécessaire au CDI, équipements informatiques par exemple ?

Deux sources essentielles de financement :

1/ les dotations par les collectivités de rattachement, c’est-à-dire les conseils généraux et régionaux. Les demandes sont transmises par l’établissement.

2/ les fonds propres de l’établissement : on prélève sur un chapitre de fonctionnement, notamment le A1, et on fait un virement au chapitre ZD : dépenses en capital, dépenses d’investissement (matériel de plus de 540 €, env. 3500 francs) après une DBM et le vote nécessaire du CA pour tout virement d’un chapitre à un autre.

On peut aussi prélever sur les fonds de réserve après DBM et vote du CA. Parfois on reçoit des crédits spécifiques. Dans ce cas, il y a une DBM pour information au CA, sans vote.

 Le budget est un budget par année civile. Quel est le délai nécessaire pour le mettre en oeuvre ?

Le projet de budget est présenté au CA avant la fin du mois de novembre, puis transmis aux autorités de contrôle. Officiellement il est exécutoire au 1er janvier suivant. A cette date, on a au moins un budget provisoire équivalent au budget de l’année précédente. En théorie, on peut donc commencer à dépenser les crédits dès le 1er janvier.

Du fait d’un changement de réglementation récent, on ne dispose plus de deux mois pour apurer les comptes de l’établissement après la fin de l’exercice annuel, mais seulement de 21 jours. Cela entraîne une indisponibilité partielle des services d’intendance jusqu’à la fin janvier, temps nécessaire à la gestion administrative, matérielle du budget, à l’apurement des comptes.

En pratique cela oblige à arrêter les commandes fin octobre pour avoir les factures et les payer avant le 31 décembre. Il est important que les usagers, en particulier les documentalistes, soient informés de ces faits. Cela permet de mieux comprendre les règles de fonctionnement, les délais de commande imposés. Rappelons qu’en fin d’exercice, le compte financier, qui atteste l’exécution du budget voté en novembre, est présenté au CA pour approbation.

 Beaucoup de modifications récentes en matière de comptabilité publique semblent entraîner plus de contraintes...

La décentralisation a apporté des modifications. D’autres sont à venir. Les ressources spécifiques et affectées sont essentiellement restées du domaine de l’Etat. Elles sont gérées au cas par cas, ce qui ne simplifie pas les choses. L’objectif est d’empêcher ces fonds d’état de « tomber » dans les fonds disponibles ou d’être utilisés à d’autres fins que celles pour lesquelles ils ont été attribués.

Une précision à ce propos. Dans l’établissement, il n’y a qu’une seule personne responsable, personnellement et pécuniairement, y compris sur ses biens propres, c’est l’agent comptable. Or tout est de plus en plus contrôlé. C’est donc naturel qu’il soit exigeant sur les procédures suivies. Le chef d’établissement est le responsable administratif, pénal, mais ses biens ne sont pas engagés.

 Concrètement, quelle est la marche à suivre pour effectuer des commandes ?

En matière de dépenses publiques, les rôles du gestionnaire et du chef d’établissement sont les suivants : le gestionnaire atteste l’existence des crédits sur l’imputation budgétaire qu’il propose sur le bon de commande, et l’ordonnateur, le chef d’établissement, juge de l’opportunité de cette dépense. Le/La documentaliste n’est pas autorisé(e) à passer des commandes. En règle générale, tout bon de commande doit être signé du gestionnaire et du chef d’établissement.

Depuis le nouveau code des marchés publics - 2002 - toute commande publique est un marché. Ce qui signifie qu’il doit y avoir mise en concurrence des fournisseurs. En théorie, il faudrait donc adresser sa liste d’ouvrages à plusieurs librairies et faire établir des devis. Après, c’est au documentaliste de justifier son choix. La réglementation n’impose pas obligatoirement le moins disant.

 Plusieurs devis sont donc obligatoires ?

En principe, oui. Mais cela dépend de la somme à dépenser. Le juge du compte n’exercera pas de contrôle tâtillon sur un budget de CDI de moins de 1500 €.

 Peut-on faire des achats directement chez les éditeurs ?

Oui. Mais il faut savoir que les circuits commerciaux sont organisés de telle façon qu’on a davantage de remise en passant par un revendeur qu’en passant par l’éditeur. De plus, cela suppose l’ouverture de nombreux comptes pour la comptabilité de l’établissement : autant de fournisseurs, autant de comptes. Pour un agent comptable c’est plus simple de n’avoir qu’un fournisseur.

 Et les achats au comptant ?

La procédure d’achat au comptant est une procédure d’exception au déroulement normal de la dépense publique puisqu’on paie avant d’avoir commandé. On engage la responsabilité de l’agent comptable, il faut donc son accord préalable.

 Il faut donc une autorisation d’achat et un accord sur une somme ?

Tout à fait. Il y a deux possibilités : l’achat au comptant au coup par coup avec autorisation pour chaque achat ; on peut aussi être bénéficiaire d’une avance permanente pour menues dépenses - 40 ou 50 € par exemple - et, dans ce cas, on a un peu de liberté. En général, on part avec l’argent de l’établissement. Le remboursement sur facture après achat est peu admis.

 Quels justificatifs faut-il produire ?

Il faut toujours justifier ces achats au moyen d’un ticket de caisse, d’une facturette sur laquelle doit figurer le moyen de règlement. Ce document doit toujours être au nom de l’établissement, surtout pas au nom de l’acheteur.

 De quels moyens d’information disposent les collègues documentalistes sur toutes ces questions de budget que nous venons d’examiner ?

Il faut interroger le chef d’établissement, le gestionnaire. Si l’information est jugée insuffisante, il faut exiger, par le biais des représentants au CA, d’avoir les informations. Rien ne doit échapper au CA : il vote un budget, il peut le modifier par DBM. Les DBM pour information sont l’occasion de faire connaître à l’ensemble de la communauté scolaire tous ces crédits spécifiques ou affectés qui arrivent dans l’établissement. A partir de là, il faut négocier... Par ailleurs les enseignants documentalistes peuvent être élus au CA. Ils peuvent aussi demander à y être invités pour toute question concernant le CDI.


Si des points sont restés dans l’ombre, vous pouvez formuler vos questions à documentalistes@snes.edu.

Les syndiqués trouveront d’autre part en ligne, sur le site national du SNES, les archives du Courrier du s1 : ils se reporteront au n°2 du 14 septembre 2002, p. 24-34, consacré au budget de l’établissement.